Malte, ses fossiles et sa géologie

Publié le 22 août 2006 par Phil Fossil

Précédemment visité seul il y a une petite dizaine d'années, l'archipel maltais était décidément bien tentant à revoir... Le chant des sirènes a porté ses fruits fin janvier, et donc votre serviteur et sa compagne y sont retournés pour une semaine de vacances bien méritées.

Un livre récent écrit par un maltais développe une théorie disant que l'archipel maltais ne serait que le reliquat de l'antique Atlantide, il en veut pour preuves la grande quantité de temples mégalithiques conservés sur une surface somme toute minuscule, ainsi que des "chemins de charrettes" découverts, ceux-ci se terminant par une falaise verticale et donc aboutissant directement dans la mer.

Ce petit article sera plus axé sur la géologie et la paléontologie de cet archipel qui est d'ailleurs une destination touristique fort prisée. Deux heures quarante d'avion suffisent de notre petite Belgique et les îles maltaises sont riches en attractions touristiques aussi bien qu'archéologiques ce qui permet de satisfaire tout le monde.

En ce qui concerne le sous-sol, il est constitué entièrement de Cénozoïque, l'Oligocène, le Miocène et le Quaternaire sont relativement riches en fossiles.

Il semble cependant pour les amateurs de "souvenirs paléontologiques" que toute exportation de fossiles soit soumise à un permis délivré par le gouvernement maltais.

Néanmoins, après de nombreuses recherches sur Internet, il n'est pas évident de trouver un texte qui indique clairement ce qui peut être fait ou non en matière de fossiles maltais !

Je suppose que là comme ailleurs, tout est une question de quantités : le vacancier qui ramènera quelques oursins fossiles ou dents de requins bénéficiera d'une "tolérance" à laquelle le gros négociant exportant quelques centaines de kilos de matériel n'aura pas droit.

La première chose à faire pour le passionné de paléontologie sera sans aucun doute de se rendre à Mdina, ancienne capitale de Malte. Il pourra y visiter le Muséum local d'Histoire Naturelle qui, outre de très belles salles de coquillages et d'oiseaux naturalisés, possède une jolie exposition de géologie locale et de fossiles trouvés dans l'Archipel.

Une salle systématique montre les principales classes d'organismes illustrées par des fossiles locaux.

Une deuxième salle explicite, couche par couche, les différents niveaux stratigraphiques rencontrés ainsi que leur répartition dans l'Archipel, et bien entendu l'essentiel de leur contenu fossilifère.

Cela permet de noter les principaux affleurements et de les visiter par après de manière systématique.

La salle de minéralogie ne se trouve pas dans le même bâtiment, mais est accessible avec le même ticket d'entrée. Les spécimens internationaux sont relativement quelconques et leur détermination n'est pas exempte de quelques erreurs grossières !

Il n'est pas vraiment nécessaire de louer un véhicule sur place, en effet la majorité des trajets peuvent se faire en bus, les transports en commun maltais ont l'avantage d'être réguliers, souvent ponctuels, relativement économiques et en même temps assez folkloriques !

Les bus en service sur Malte ont plusieurs décennies d'âge, et certains que l'on peut qualifier de "vénérables" mériteraient sans conteste de figurer dans un musée de l'automobile...

Une heure suffit en général pour se rendre un peu partout dans l'île de Malte, mais pour visiter Gozo un trajet supplémentaire d'une demi-heure en ferry est bien entendu indispensable.

Au point de vue monétaire l'unité est la livre maltaise, elle vaut environ 2,50 euros soit, à la grosse louche pour les nostalgiques, 100 anciens francs belges ce qui permet de faciliter la conversion.

Les couches qui affleurent dans l'archipel maltais sont :

- Calcaire corallien inférieur :

Ce calcaire très dur est daté de l'Oligocène, comme son nom l'indique il s'agit d'un calcaire construit par des coraux coloniaux. Le sommet de cette couche contient une lumachelle à scutelles, ces oursins plats y sont extrêmement nombreux. Comme ce niveau peut être très dur, il se prête particulièrement bien au sciage et polissage et est fort utilisé pour le dallage, les sections d'oursins sont assez esthétiques.

On y rencontre également des couches montrant des nodules alguaires, assez proches au point de vue taxonomique des stromatolithes. Ces niveaux affleurent à Salina Bay.

- Calcaire à Globigérines :

La couche maltaise la plus typique, ce calcaire jaune un peu tuffacé montre une ressemblance marquée avec notre "tuffeau de Maastricht", quoique un peu plus induré.

Il doit son nom au fait qu'il soit constitué majoritairement de foraminifères, appelés Globigérines.

Daté du Miocène, il est travaillé à la scie et fournit une pierre de construction économique. La majorité des immeubles maltais sont construits avec cette roche.

Néanmoins, certains niveaux tendent à s'éroder à l'air libre, formant ce qui est appelé une "érosion en rayon de ruche". (Honeycomb weathering)

Les fossiles plus durs ressortent particulièrement bien et sont visibles dans les vieux murs, par exemple à Valetta, la capitale.

Ce niveau étant sans doute le plus accessible, il offrira le plus d'opportunités de collecte. Par exemple sur les plages rocheuses de Valetta, Sliema et Gozo. (Près de la « Fenêtre Azur »)

La relative dureté de cette roche fait qu'il est nécessaire, comme pour la craie ou le tuffeau, de creuser un "canal" assez profond tout autour du spécimen et quand tout le pourtour est suffisamment évidé de faire "sauter" la plaquette contenant la pièce convoitée hors de la couche rocheuse. Avec un peu de pratique la casse est réduite au minimum car la roche se fragmente très bien.

C'est bien entendu l'affaire d'un peu d'habitude, le "canal" doit être suffisamment profond pour englober le fossile mais il n'est pas toujours évident d'estimer la profondeur de la partie de ce dernier qui reste cachée dans la roche !

Inclus dans cette couche jaunâtre se trouvent deux niveaux phosphatés qui montrent des galets brunâtres riches en moules internes de bivalves, gastéropodes, coraux, des dents de requins, et des oursins qui, eux, ont conservé leur test.

Ces niveaux peuvent être observés à Sliema et surtout à Buggiba.

- Sables verts :

Riche en glauconie, ce sable ne conserve sa couleur verte qu'en place (lors d'un sondage, par exemple) tandis qu'à l'affleurement l'altération de la glauconie lui confère une couleur brune à rousse.

Ces sables sont riches en moules internes de mollusques, et contiennent des dents de poisson et des oursins, notamment les gros Clypeaster.

A Golden Bay mais également à Gozo (autour du port d'arrivée des ferries en provenance de Malte), on peut échantillonner ce niveau.

Ce sédiment peu ou pas consolidé est très riche en fossiles qui sont faciles à extraire avec un couteau ou une petite scie de jardin, le piochon y fait également du bon travail.

- Argiles bleues :

Conférant au paysage une physionomie de "bad lands", cette argile libère facilement ses fossiles : gastéropodes, cousin des nautiles Aturia aturii, coraux solitaires... Parfois pyritisés.

Là, un simple ramassage aidé d'un petit couteau ou d'une spatule métallique suffit pour faire une récolte honorable.

- Calcaire corallien supérieur :

A nouveau un calcaire dur, mais cette fois-ci daté du Miocène. On y retrouve des colonies coralliennes qui apparaissent par érosion différentielle.

- Quaternaire (remplissage de cavernes) :

Difficilement accessible aux amateurs, ce niveau a été fouillé par exemple dans la grotte de Ghar Dalam et a livré un nombre incalculable de dents et ossements de mammifères.

Toutes ces pièces sont exposées dans le beau musée qui jouxte la grotte.

On y a découvert du cerf, de l'hippopotame, de l'éléphant nain sans oublier des rongeurs, oiseaux et également des artefacts humains.

Quelques fossiles maltais exposés au Musée de Mdina :